France en crise : le Narcotrafic et la violence en explosion, une menace au coeur de la société...
- Mireille Bleivas
- 17 août
- 4 min de lecture
La France traverse une crise inédite liée au narcotrafic, qui gangrène désormais tout son territoire, sans « zone blanche » épargnée, selon le rapport récemment publié par l’Office anti-stupéfiants (Ofast). Ce fléau menace l’État de droit et la sécurité des populations, porté par une explosion sans précédent de la consommation de cocaïne et une violence devenue une véritable « contre-culture »
Une crise nationale profonde et sans précédent
Le dernier rapport confidentiel de l’Ofast, remis en juillet 2025 et consulté par plusieurs médias, décrit une France submergée par un marché criminel estimé à 7 milliards d’euros, dominé par la cocaïne dont la consommation a explosé. Avec 3,7 millions de personnes ayant expérimenté la drogue et 1,1 million d’usagers réguliers en 2023, la France est ainsi devenue l’un des pays européens les plus touchés. Aucun territoire n’est épargné, qu’il s’agisse des grandes métropoles comme Marseille et Grenoble, des villes moyennes comme Dijon, ou des zones rurales, illustrant une diffusion géographique inédite qualifiée de « sans zone blanche »
La production mondiale de cocaïne a atteint un niveau record en 2024 avec 4000 tonnes, dont 2700 en Colombie, soit une hausse de 53 % par rapport à 2022. Cette abondance alimente une offre très accessible en France, avec une baisse significative du prix à 58 euros le gramme, facilitant encore plus la diffusion auprès d’un public élargi, notamment les jeunes adultes.
La violence, une « contre-culture » enracinée
Le rapport alerte sur la montée d’une violence extrême liée au narcotrafic, qui s’étend géographiquement à 173 villes en 2024 contre 161 en 2023. Le modèle de violence a évolué : il ne s’agit plus seulement de règlements de comptes entre trafiquants, mais aussi d’une violence symbolique et sociale, visant à imposer une « contre-culture » de la peur et du crime. À Marseille, plaque tournante majeure, 44 personnes ont été tuées dans des luttes mafieuses en neuf mois. Des actes effroyables, comme l’assassinat et l’immolation d’un jeune homme de 19 ans dans le Gard, traduisent une brutalité nouvelle.
Outre les violences « classiques », le rapport évoque des attaques contre les institutions et les représentants de l’État, dont des menaces récurrentes et des assassinats ciblés, comme l’assaut sanglant contre un convoi pénitentiaire en 2024 ayant coûté la vie à deux agents. La DZ Mafia marseillaise, groupe d’extrême violence, incarne cette menace avec ses méthodes déstructurées et sa mise en scène médiatique.
Enfin, le narcotrafic influe directement sur le quotidien des populations : offre de services parallèles, intimidations, fermeture d’écoles ou évacuations d’immeubles à cause de points de deal en milieu urbain montrent une criminalité qui s’infiltre dans tous les aspects de la vie sociale.
Un marché criminel en forte expansion
Le marché du narcotrafic en France est le plus important de tous les marchés criminels nationaux. La cocaïne y joue un rôle central, avec des saisies record : 37,5 tonnes au premier semestre 2025, soit une hausse de 45 % par rapport à 2024. Des opérations majeures, notamment aux Antilles françaises et en Polynésie, témoignent de réseaux logistiques sophistiqués et internationaux.
Parallèlement, le cannabis reste la drogue la plus consommée en France (plus de 50 % des adultes ayant expérimenté). Bien que les saisies de cannabis aient légèrement diminué, les drogues de synthèse, telles que l’ecstasy et la MDMA, connaissent une forte croissance avec une augmentation des cachets saisis de 123 % en 2024.
Des réseaux criminels hautement organisés et numériques
L’organisation du narcotrafic est pyramidale :
- Haut du spectre : une centaine de grands importateurs basés souvent à l’étranger (Dubaï, Maghreb, Espagne), liés aux cartels sud-américains, blanchissent d’énormes profits à l’échelle internationale.
- Milieu du spectre : environ 5000 semi-grossistes présents dans les grandes villes françaises, adoptant des stratégies entrepreneuriales innovantes, telles que le recrutement de profils inhabituels (mineurs isolés, femmes âgées) pour brouiller les pistes.
- Bas du spectre : points de deal et réseaux locaux impliquant jusqu’à 200 000 personnes. Même si les opérations « place nette » ont diminué le nombre de points de deal (-32% depuis 2020), les trafiquants s’adaptent en multipliant la livraison à domicile, les lieux clandestins (« Airbnbeuh ») et le recours au numérique.
La narco-corruption : une menace systémique
Le rapport souligne une aggravation de la « narco-corruption », affectant l’ensemble du tissu institutionnel et économique. Des agents publics (fonctionnaires, élus, policiers) sont infiltrés ou menacés, avec des cas récents impliquant des personnels d’aéroport à Roissy. Cet affaiblissement de l’État favorise la pérennisation des réseaux et leur emprise, tandis que le blanchiment d’argent s’insinue dans de nombreux secteurs économiques (immobilier, commerces, location de voitures).
En 2024, 122 millions d’euros d’avoirs criminels ont été saisis, représentant cependant seulement 11 % des flux réels, révélant l’ampleur du défi.
Un défi majeur pour la santé publique et la cohésion sociale
L’explosion de la consommation conduit à une forte augmentation des risques sanitaires. En 2023, 12 % des décès liés aux stupéfiants concernaient des moins de 25 ans. Plus de 5000 passages aux urgences liés à la cocaïne ont eu lieu, dont 1670 hospitalisations. Les addictions précoces, souvent associées à des troubles psychiatriques, complexifient la prise en charge.
Le coût social du narcotrafic est évalué à 7,7 milliards d’euros, avec une forte charge sur les finances publiques (2 milliards). Le narcotrafic aggrave les violences intrafamiliales, les violences sexuelles, la sécurité routière et la délinquance urbaine. Les structures d’addictologie, saturées, peinent à répondre aux besoins croissants, tandis que la stigmatisation des consommateurs marginalise encore davantage les plus vulnérables.
Une riposte étatique en cours mais jugée insuffisante
L’État français multiplie les opérations contre les trafiquants, comme les opérations « place nette », qui ont permis une réduction significative des points de deal et des arrestations majeures, notamment à Marseille avec la démantèlement partiel de la DZ Mafia en avril 2025.
Toutefois, la commission d’enquête sénatoriale de mai 2024 critique cette stratégie, pointant un manque de moyens, de coordination et l’absence de réponse globale, notamment en matière de prévention pour les jeunes.
En avril 2025, une proposition de loi a été adoptée pour créer un Parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco), renforcer les pouvoirs et moyens de l’Ofast, et mieux saisir les biens des trafiquants. Cette loi vise à faire de l’Ofast une agence semblable à la DEA américaine. Néanmoins, le volet prévention reste marginal et les forces de police et judiciaires demandent davantage de moyens pour faire face à cette crise.
Cette situation dramatique, nourrie par l’explosion de la production mondiale de cocaïne, l’ingéniosité des réseaux criminels et la fragilisation des institutions, pose un défi multidimensionnel majeur à la France, tant sur le plan sécuritaire, sanitaire, économique que social.

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